dimanche 30 juillet 2017

L'ALBUM DE LA SEMAINE (34) : "The Last Stand" - SABATON

Pour (avoir envie de) découvrir Sabaton, il faut d'abord franchir un certain nombre d'obstacles un peu décourageants.
L'icônographie, d'abord, car Sabaton est aux militaires ce que Manowar est aux Vikings : treillis pour tout le monde, pochettes bellicistes et gloire aux Morts-pour-la-patrie. Mention spéciale-honte au frontman/compositeur Joakim Brodén, avec son débardeur noir riveté de plaques de métal, ses lunettes miroirs d'aviateur de chasse, sa crête et son collier de barbe, bref le genre de gros con à organiser un lâcher de galinettes cendrées dans le Bouche-aux-Noix. Sans parler de sa voix, sombre et profonde comme un canon de la Première Guerre Mondiale, et ses RRRrrr rocailleux, dont Marcel Pagnol dirait qu'il roulent "comme les ruisseaux roulent les graviers", mais dont je dirais qu'ils roulent comme un Prussien roule sa terreur dans les tranchées. Ce qui convient parfaitement aux paroles des chansons, à mi-chemin entre L'art de la guerre de Sun Tzu et le Metal Heart d'Accept.
Bref, le genre de groupe parfait pour un fan décérébré de Rambo et de Captain America.
Hé ! Mais c'est moi, ça ! Alors?
Alors, tout faux.
Pour commencer, Joakim Brodén est loin d'être un gros con, et il est même particulièrement sympa sur scène : très souriant, l'air sincèrement content d'être là, potache avec ses camarades de scène, et assez hilarant avec ses positions de yogi yakuza - ses fentes de jambes sont déjà célèbres. Et puis, ses textes ne sont pas les pensums patriotiques et bellicistes qu'on pouvait craindre. Dans le cas de The Last Stand, il s'agit d'un album concept dont chaque morceau raconte un événement militaire à l'héroïsme désespéré, des histoires - souvent tragiques - d'ultime sursaut de bravoure, de dernière bataille perdue d'avance, de sacrifice vain et sublime. Le tout joué avec une sincérité et une passion totalement décomplexées et véritablement communicatives, chœurs monstrueux, mélodies limpides, claviers épiques, guitares meurtrières, refrains dantesques.
Un exemple parfait, "Shiroyama", qui raconte la fin de l'âge des Samouraïs, décimés en 1877 par les armées de l'Empereur Mutsuhito.
Opposés aux réformes impériales qui visaient à mettre fin à la féodalité, les Samouraïs se soulèvent et constituent une armée de plusieurs dizaines de milliers d'hommes.
Après le siège meurtrier de la caserne gouvernementale de Kumamoto, ils se trouvent réduits à moins de cinq cents, isolés et encerclés sur le Mont Shiroyama par sept mille soldats, qui les bombardent et les assaillent sans relâche.
Bientôt, les Samouraïs, menés par Takamori Saïgo, ne sont plus que quarante.
Ils tirent alors leur sabre, dévalent une dernière fois la colline, chevauchent jusqu'au cœur des lignes ennemies et périssent jusqu'au dernier.
Ça méritait bien une chanson épique, non ?


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